Par Jérôme Poggi
C'est une "Ecole de Nancy" du XXIème siècle qui s'invente sur le nouveau campus d'Artem, rapprochant aussi bien géographiquement que pédagogiquement les écoles de commerce, d'ingénieur et d'art de la capitale lorraine qui partageront à terme le même campus au coeur de la capitale de la Lorraine.
C'est une "Ecole de Nancy" du XXIème siècle qui s'invente sur le nouveau campus d'Artem, rapprochant aussi bien géographiquement que pédagogiquement les écoles de commerce, d'ingénieur et d'art de la capitale lorraine qui partageront à terme le même campus au coeur de la capitale de la Lorraine.
Vue du futur Campus ARTEM, sur les anciennes friches des usines Molitor, au coeur de la cité nancéenne. |
C’est sous ce titre - L’artiste, le
savant et l’industriel - que paraissait en 1824 un petit essai sous
forme de dialogue par lequel Claude Henri de Rouvroy, comte de
Saint-Simon concluait son dernier manuscrit, manifeste de la
future école saint-simonienne.
L’auteur du Système industriel y mettait en scène ceux qu’il considérait alors comme les forces vives de la société, appelant à l’union des artistes et des savants, « les hommes à imagination », avec les industriels, « force physique du corps social ». Loin de distinguer les arts des sciences dans une partition qui conférerait aux uns la palme de l’inspiration et de l’intuition et aux autres celle de la raison et de l’analyse, Saint-Simon plaçait au contraire l’artiste et le savant côte à côte, aux « avant-gardes » de la société, explorant, devinant ou inventant le monde chacun à sa manière, mais suivant des processus créatifs voisins.
L’auteur du Système industriel y mettait en scène ceux qu’il considérait alors comme les forces vives de la société, appelant à l’union des artistes et des savants, « les hommes à imagination », avec les industriels, « force physique du corps social ». Loin de distinguer les arts des sciences dans une partition qui conférerait aux uns la palme de l’inspiration et de l’intuition et aux autres celle de la raison et de l’analyse, Saint-Simon plaçait au contraire l’artiste et le savant côte à côte, aux « avant-gardes » de la société, explorant, devinant ou inventant le monde chacun à sa manière, mais suivant des processus créatifs voisins.
En ce début de XXIe siècle, le point de
vue de Saint-Simon semble convaincre plus que jamais. Les formations
transdisciplinaires se multiplient, rapprochant le scientifique et le
commercial comme l’ont fait HEC et les Mines de Paris par exemple. Se réclamant
du concept de « Design - Thinking » en vogue aux états-Unis, ces formations
poussent de plus en plus la transdisciplinarité jusqu’à croiser les formations
artistiques. à Lyon, l’école de management et Centrale Lyon viennent ainsi de
créer un nouveau - Master en « Innovation, design, entreprenariat et arts »,
alors que l’école - de management de Grenoble s’est associée au Strate Collège
Designers (Sèvres) pour offrir un double cursus à leurs étudiants.
Prochainement, l’école des beaux-arts de Nantes et l’Ecole de management
Audencia proposeront un post-diplôme conjoint imaginé et dirigé par Fabrice
Hyber (lire Le Quotidien de l’Art du 28 septembre 2012), s’adressant
aussi bien « aux artistes, entrepreneurs, et diplômé(e)s de
l’enseignement supérieur ».
S’il existe à l’étranger quelques campus
interdisciplinaires, à l’instar de l’Aalto University d’Helsinki, c’est
certainement à Nancy que les choses vont le plus loin. C’est aujourd’hui qu’y
est inauguré le nouveau campus ARTEM où Nicolas Michelin vient de livrer la
nouvelle école des Mines, bientôt rejointe par l’école supérieure des arts de
Nancy qui s’installera en 2014 dans un très beau bâtiment signé du duo
autrichien Dietrich/Untertrifaller, puis par l’ICN Business School en 2016.
Dans un esprit héritier de l’école de Nancy, le projet ARTEM est né en 1999
d’une volonté de réunir dans un même lieu des étudiants de différentes
disciplines pour favoriser les rencontres et croisements fortuits. Mais très
vite, au-delà d’un simple rapprochement immobilier, « c’est un
véritable socle conceptuel commun qui a émergé dans le projet ARTEM,
s’enthousiasme Christian Debize, directeur de l’école d’art. Des enseignements
sont partagés entre les trois écoles, permettant d’aborder de façon
transversale des notions comme celle de "performance" par exemple, dont
le sens est très différent d’un point de vue technologique, économique ou
artistique ».
Dans cette logique, un nouveau Master of Science « Design et management du luxe » vient d’être lancé par l’ICN, ouvert aux étudiants des trois établissements. « L’objectif de cette alliance, explique Jean-Claude Grass, directeur des programmes à l’ICN Business School, est de relier, tout en les distinguant, les hommes (artistes, ingénieurs et managers), les disciplines (art, science et technologie, management), les savoir-faire (savoir créer, savoir produire, savoir valoriser et négocier) pour former la nouvelle génération de décideurs et de créateurs». Un projet saint-simonien en somme…
Jérôme Poggi, 30 novembre 2012
Chronique publiée dans le Quotidien de l'art du 30 novembre 2012